TÉLÉPHONE AU VOLANT, QUE DIT LA LOI ?


En 2018, on estime que 94 % des français ont un téléphone portable.


Les publicités de la Sécurité routière ne cessent de rappeler les chiffres : une conversation téléphonique au volant multiplie par trois le risque d’accident, et la rédaction d’un SMS le multiplie par vingt-trois.


C’est pourquoi le Code de la route dispose que tout conducteur doit se tenir constamment en état et en position d'exécuter commodément et sans délai toutes les manœuvres qui lui incombent, sans entrave dans ses mouvements et dans son champ de vision (article R. 412-6).


Face aux mauvaises habitudes des français, le législateur a décidé de durcir le ton. Quitte à prendre des mesures controversées ?



  1. Évolution législative


Apparu sur le marché français dans les années 1990, le Code de la route n’en fait pourtant pas  mention avant 2003[1], avec la création de l’article R.412-6-1, interdisant officiellement l’usage du téléphone tenu en main par le conducteur d’un véhicule en circulation.


La sanction encourue est alors une amende prévue pour les contraventions de la deuxième classe et la perte de 2 points sur le permis de conduire.


La peine est alourdie avec le décret du 3 janvier 2012[2] : le fait d’utiliser son téléphone en conduisant devient une infraction de quatrième classe, dont la peine prévue est une amende forfaitaire de 135 euros ainsi que la perte de 3 points sur le permis de conduire.


Depuis le 1er avril 2020[3], l’usage du téléphone au volant peut même entraîner la suspension du permis de conduire du contrevenant, si cette infraction est établie simultanément avec « une des infractions en matière de respect des règles de conduite des véhicules, de vitesse, de croisement, de dépassement, d'intersection et de priorités de passage dont la liste est fixée par décret en Conseil d’État ».


Désormais, les forces de l’ordre peuvent procéder à la rétention du permis de conduire s’ils constatent que le conducteur a utilisé son téléphone lors de la commission d’une autre infraction telle que le franchissement d’un feu rouge ou l’absence de clignotant.


Cette contravention vient donc grossir la liste des infractions de l’article L.224-1 du Code de la route, telles que la conduite sous l’empire d’un état alcoolique ou le délit de fuite, pour lesquelles est prévue une suspension administrative du permis de conduire par décision préfectorale (décision référencée « 3F »).



  1. Les éléments constitutifs de l’infraction


 


« Usage », « téléphone », « véhicule en circulation »…


 


Il est difficile pour le contrevenant de comprendre ce qui caractérise cette infraction.


À moins qu’il s’agisse d’un « PV à la volée », sans interpellation par les forces de l’ordre[4], cette infraction est relativement difficile à contester.


Au terme de l’article 537 du Code de la procédure pénale, les procès-verbaux font foi jusqu’à preuve du contraire. Il est donc très difficile de contester un procès-verbal car les tribunaux de police auront tendance à arrêter leur jugement aux constatations des forces de l’ordre.


À ce titre, il n’est pas inutile de rappeler que les procès-verbaux doivent indiquer les circonstances concrètes dans lesquelles ces contraventions ont été relevées.


Certains prévenus jouent sur le mot « usage » en expliquant qu’ils étaient simplement en train de ramasser ou ranger le téléphone. Mais le simple fait que le téléphone soit « tenu en main » suffit pour caractériser l’infraction.


Ainsi, le fait d’utiliser son téléphone comme GPS ou pour passer un appel n’est pas interdit dès lors que l’appareil n’est pas manipulé par le conducteur.


Une dernière précision : l’infraction vise un véhicule « en circulation ». L’infraction est donc caractérisée si le véhicule est seulement à l’arrêt (au feu rouge par exemple) dès lors que le moteur tourne encore.


La Cour de cassation va encore plus loin en précisant que le véhicule doit non seulement être arrêté moteur éteint, mais aussi qu'il soit garé sur un emplacement prévu à cet effet[5].


Cette situation est particulièrement injuste pour tous les chauffeurs-livreurs ou encore VTC, dont le téléphone et la voiture constituent les outils de travail. Mais pour éviter toute contravention, il leur faut se garer et couper le moteur avant d’accepter une course ou un appel d’un client. es



  1. Kit mains-libres : quid ?


Les dispositions de l’article R. 412-6-1 ne se limitent pas au téléphone portable : « est également interdit le port à l'oreille [...] de tout dispositif susceptible d'émettre du son, à l'exception des appareils électroniques correcteurs de surdité. »


 Depuis le 1er juillet 2015[6], l'usage du kit mains-libres, oreillettes ou autre appareil capable d’émettre du son est donc également interdit, sous peine de sanctions identiques à celles prévues pour le téléphone.


 En cas de verbalisation, le conducteur pourra toujours contester si le dispositif utilisé est justifié d’un point de vue médical. La contestation doit être réalisée dans les quarante-cinq jours suivant l’édiction de l’avis de contravention ; elle peut se faire via le site internet ANTAI ou par lettre recommandée avec accusé de réception, en joignant l’original de l’avis de contravention et le formulaire de requête en exonération dûment complété.


 


[1]    Décret n° 2003-293 du 31 mars 2003 relatif à la sécurité routière et modifiant le code de procédure pénale et le code de la route


[2]    Décret n° 2012-3 du 3 janvier 2012 portant diverses mesures de sécurité routière


[3]    Loi d'orientation des mobilités (LOM) du 26 décembre 2019 / Comité interministériel de la sécurité routière (CISR) du 9 janvier 2018


[4]    Voir article : « Article L. 121-3 du code de la route : un ami qui vous veut du bien ! »


[5]    Crim. Cass., 23 janvier 2018, n° 17-83077


[6]    Décret n° 2015-743 du 24 juin 2015 relatif à la lutte contre l'insécurité routière


INTERVENTIONS

Maître Iosca intervient dans les plus grands médias français

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