Réponse à mes détracteurs


La justice n'est pas glamour. C'est une matière aride, difficile, technique. Souvent, elle rebute, et ses décisions sont mal comprises. Pourquoi condamne-t-on des innocents ? Pourquoi libère-t-on des coupables ? Étrange paradoxe : c'est bien souvent du travail de la justice que naît le sentiment d'injustice.

Il y a quelques jours, le tribunal correctionnel d'Agen a rendu une décision favorable à l'un de mes clients. Celui-ci était accusé d'avoir roulé à 244 km/h sur une autoroute. Il s'était fait flasher par un radar mobile, et s'était vu retirer son permis dans l'attente de son procès.

Cette décision a eu un fort retentissement médiatique. Elle constitue aussi une belle victoire pour l'avocat du code de la route que je suis. J'ai donc souhaité la faire partager à mes "amis" sur ma page Facebook. Beaucoup m'ont félicité. D'autres ont répondu par le mépris. Certains, rares, ont été grossiers. En résumé, les reproches étaient peu ou prou les mêmes : « vous avez fait libérer un chauffard dangereux, pas de quoi être fier. Vous ferez moins le malin quand l'un de vos enfants se fera écraser par l'un de vos clients fraîchement libérés ».

Passons la violence de ces derniers propos. Il témoigne davantage d'une réaction épidermique que d'un véritable souhait qu'il arrive malheur à moi ou mes proches. Mais arrêtons-nous quand même un instant, et posons-nous une seconde la seule question qui aurait dû m'être posée par mes détracteurs : pourquoi des juges libres, indépendants, professionnels, ont-il innocenté un coupable ?

Pour une raison simple : mon client n'était pas coupable. Il était innocent des faits qui lui étaient reprochés. Si les juges sont arrivés à cette conclusion, ce n'est pas pour mes beaux yeux (si,si). C'est parce que j'ai soumis à ce tribunal une erreur de procédure qui n'a pas permis d'établir avec certitude sa culpabilité.

La procédure judiciaire n'est pas une coquetterie bureaucratique : elle est la garantie que les poursuites engagées contre vous reposent sur des preuves irréfutables. Dans le cas qui nous intéresse, entre autres erreurs, le radar qui a flashé mon client n'était pas homologué. Un détail ? Non. Si la justice exige que ces appareils soient certifiés, c'est parce qu'ils constituent le socle de la culpabilité. Ils doivent être testés et contrôlés afin de s'assurer qu'ils sont infaillibles. Mon client roulait à 244 km/h ? Nous n'en savons rien, car l'appareil qui a mesuré cette vitesse n'a pas rempli les conditions indispensables à son bon fonctionnement. Sa fiabilité était remise en cause. Dès lors, pouvait-on envoyer mon client en prison ? Le tribunal a logiquement répondu que non.

A mon tour de répondre à mes détracteurs. Et à mon tour d'inverser les rôles : que direz-vous le jour où vous serez arrêté pour un excès de vitesse que vous n'avez pas commis ? Le radar annoncera un chiffre, et pourtant vous savez, au fond de vous, que vous rouliez moins vite. Vous vous débattrez, jurant aux agents que non, ce n'est pas possible, la machine déraille. Serez-vous heureux d'aller en prison ? N'aurez-vous pas envie que votre innocence soit reconnue ?

La procédure judiciaire est le socle de la justice dans un Etat démocratique. Elle est la garantie que vous, moi, chacun d'entre nous sera traité par la justice sur la base de preuves indiscutables. Et que chacun aura le droit, face à l'autorité, de se défendre. Dans certains pays, ce droit n'existe pas. Une arrestation vous emmène en prison, sans autre forme de procès. Peu importe la procédure, peu importe les preuves. Cette justice-là, je ne la souhaite à personne. Pas même aux enfants de mes détracteurs impolis.

Vive le droit. Et restez prudent sur la route bien sûr.

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